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Interview Alumni : Laïla Tamani (ESD 2018) “Comme le changement climatique, tout le monde est concerné par l’éco-conception”
Une chose est certaine chez Laïla, sa curiosité n’a pas de limite ! Entre création, digital et enjeux climatiques, ses passions l’ont naturellement guidée vers le métier qu’elle exerce aujourd’hui : UX Designer et consultante en éco-conception pour France Télévisions.
Dans cette interview Laïla nous parle de son parcours et de l’approche responsable dans le domaine du numérique. Un sujet qui nous tient particulièrement à cœur à l’ESD puisque nous avons récemment intégré le séminaire « Vers un numérique durable » à l’ensemble de nos Mastères.
Peux-tu nous présenter les grandes étapes de ton parcours ?
Suite à un Bac S option Arts Plastiques, j’ai découvert les études en Arts Appliqués grâce à une ancienne élève de mon lycée. J’ai fait une MANAA (Mise à niveau en Arts Appliqués) à l’École de Condé (même réseau que l’ESD : AD Éducation), suivie d’un BTS Design Graphique en alternance, puis une 3e année de Bachelor en gestion de projets web, et enfin un Mastère Stratégie Digitale à l’ESD (actuellement stratégies e-business) dès 2018.
À l’époque, il existait peu de Mastères orientés autour de l’UX. Dès le BTS, je n’ai fait que des stages et de l’alternance, ce qui m’a permis de découvrir différentes typologies d’entreprises (agences, startup…) et des projets variés.
Pour mon Mastère, j’ai travaillé en alternance dans une startup, Transparency-One, dans laquelle je suis restée plus de 5 ans et demi. Par la suite j’ai rejoint une agence de conseil car j’avais besoin d’évoluer et je souhaitais trouver un poste avec une équipe de designers conséquente.
Quel est ton rôle aujourd’hui chez France Télévisions ?
J’ai toujours été réticente à l’idée de rejoindre un cabinet de conseil : j’avais eu beaucoup d’échos d’amis consultants, qui étaient parachutés en mission, sans aucune nouvelle de leur agence. Comme je souhaitais découvrir différents types de missions, j’ai finalement rejoint Monsieur Guiz. Je cherchais une entreprise de conseil à taille humaine, qui mise sur la montée en compétence, et proche de ses consultants. On peut participer activement en interne en partageant nos connaissances & nos compétences, via des articles de blog, des journées de formation ou encore des ateliers proposés gratuitement à des entreprises & associations (les ateliers du produit).
Ma première mission de conseil était pour NOWU, un média sur l’écologie destiné aux jeunes, appartenant à France Télévisions.
Désormais je suis UX Designer pour le back-office des plateformes de replay de France Télévisions (france.tv) et je suis également en charge depuis peu de la partie éco-conception.
D’où vient ton intérêt pour le numérique responsable ?
Dans ma vie personnelle, je suis intéressée depuis plusieurs années par tout ce qui touche au réchauffement climatique et aux solutions qu’on peut appliquer au quotidien pour en limiter les causes. En 2021, je souhaitais trouver un moyen d’allier mes compétences professionnelles à cette cause. Je suis devenue animatrice de la Fresque du Climat.
« J’ai pris conscience que l’industrie numérique n’était pas si virtuelle »
J’ai découvert peu à peu qu’il existait des associations comme Designers Éthiques (qui ont sorti le 1er guide d’éco-conception de services numériques dédié aux designers) ou encore Green IT.
En faisant de la veille, j’ai pris conscience que l’industrie numérique n’était pas si virtuelle, et qu’elle est un secteur en pleine croissance, ce qui occasionne de nombreux impacts à la fois humains & écologiques. En cherchant une formation, j’ai découvert le monde du Numérique Responsable, et l’existence du label Numérique Responsable. En Avril 2023 j’ai donc pu faire une formation dédiée, ce qui me permettra par la suite d’accompagner les organisations à réinterroger leurs pratiques et réduire progressivement leur impact.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur l’éco-conception ?
L’éco-conception est la prise en compte des impacts environnementaux lors de la conception & du développement d’un produit ou d’un service, tout au long de son cycle de vie. Appliquée au numérique, son objectif est de réduire l’impact environnemental d’un service numérique en général – qu’on applique aussi aux unités fonctionnelles (par exemple, regarder 1h de vidéo en Haute Définition).
Cette approche étudie en amont les besoins utilisateurs (en soit, c’est faire de l’UX 😄).
Il faut savoir que 75% des impacts environnementaux du numérique surviennent lors de la fabrication des appareils (ARCEP), comme les ordinateurs, les écrans TV, les smartphones, objets connectés…
Nos appareils deviennent de plus en plus lents et avec de plus en plus de bugs, à mesure que nos applications & logiciels deviennent de plus en plus gourmands (obésiciel), en demandant de plus en plus de puissance informatique alors que les fonctionnalités restent similaires…
D’après le Baromètre du numérique 2021, 37% des Français achetaient un nouveau smartphone parce que l’ancien ne fonctionnait plus correctement (lenteur, bug…) ou parce que le système d’exploitation n’était plus à jour.
Faire de l’éco-conception, c’est donc lutter contre l’obsolescence provoquée par la surcouche logicielle afin d’éviter de changer d’appareil prématurément.
Qui est concerné aujourd’hui ? Quelles sont les bonnes pratiques incontournables ?
Je pense que, comme le changement climatique, tout le monde est concerné par l’éco-conception ! Pour moi, cela se joue entre les concepteurs de services numériques, fabricants d’appareils numériques, et enfin les utilisateurs qui peuvent modérer leurs usages :
- Les concepteurs de logiciels, applications & site web ont tous un rôle à jouer pour éco-concevoir mais aussi sensibiliser leurs utilisateurs.
- Les fabricants d’appareils numériques peuvent par exemple faire le choix de ne pas sortir de nouveaux modèles tous les ans, faire attention à l’approvisionnement, et de faire en sorte de pouvoir mettre à jour pendant plusieurs années les vieux appareils.
- Les utilisateurs, eux, peuvent faire le choix de garder plus longtemps leurs appareils et de prolonger au maximum leur durée de vie, mais également de se renseigner sur le changement climatique. Ils peuvent modérer leurs usages en choisissant, par exemple, de moins regarder de vidéos ou en réduire la qualité.
J’aime particulièrement la marque Fairphone, dont les téléphones sont réparables très aisément (les pièces disponibles facilement) et garantis 5 ans, ce qui est assez unique dans le secteur ! Ils font attention à prolonger les mises à jour et le support utilisateur, il existe même une communauté autour du système d’exploitation pour faire perdurer les téléphones au-delà de la garantie.
Je pense que les incontournables de l’éco-conception sont :
- (Se) sensibiliser aux enjeux et impacts du changement climatique & de l’industrie du numérique (impacts écologiques et humains)
- Savoir faire un état des lieux & un audit de son organisation et / ou de son produit en termes d’éco-conception
- Connaître les principaux leviers & bonnes pratiques de l’éco-conception (par exemple, limiter l’usage de la vidéo, choisir les bonnes couleurs, optimiser les parcours utilisateurs pour éviter des chargements de page inutiles…), en s’appuyant sur des guides ou référentiels, comme le RGESN, Designers Éthiques, ou encore Green IT.
Je vous renvoie à une série de deux articles que j’ai rédigés à ce propos : « Pourquoi concevoir responsable en tant que designer ? » + « Comment concevoir de manière responsable en tant que designer« ?
Tu fais partie de la promotion 2018, pourquoi avoir choisi l’ESD ?
Un jour, je rendais visite à une amie qui a fait 5 ans à l’école de Condé. L’ESD était située à l’époque vers la rue Cambronne. En allant manger dans un restaurant du coin, je suis tout simplement tombée sur la devanture de l’ESD, et je me suis renseignée sur le site dans la foulée pour éventuellement m’y inscrire. Je souhaitais absolument continuer en alternance, et étoffer mes compétences & connaissances au-delà de mon cœur de métier (UX/UI Designer).
« J’ai été séduite dès le début par la pédagogie de l’école et sa taille humaine. »
J’ai pu passer un test écrit, qui permettait d’évaluer mes capacités à analyser un brief, et comprendre mon cheminement pour y répondre. J’ai beaucoup aimé l’échange qui en a suivi avec la directrice de l’ESD de l’époque (Coralie Boulay). Encore aujourd’hui je me souviens de sa grande implication et suis reconnaissante de l’aide et du soutien qu’elle a pu m’offrir pour trouver mon alternance ! J’ai été séduite dès le début par la pédagogie de l’école et sa taille humaine.
Lorsque j’ai vu que l’ESD appartenait au même réseau que Condé (la première école que j’ai faite), cela m’a rassurée car Condé est une école exigeante, pointue et sérieuse ; ce qui n’est pas le cas de toutes les écoles.
Quels souvenirs gardes-tu de l’ESD ?
Je me souviens de nombreux projets, d’une belle énergie, d’une équipe à taille humaine, de se jeter à l’eau même quand on a aucune connaissance ou compétence sur un sujet, ce qui arrive très souvent en milieu professionnel ! J’ai également apprécié qu’on ait eu des questionnaires pour donner nos avis sur l’organisation, les intervenants… C’est une école qui a su écouter nos retours.
Comment le réseau a-t-il contribué à développer ta carrière ?
Il y a contribué à 90%, je pense ! Les années précédant le Mastère, je faisais beaucoup de candidatures spontanées. Pour le Mastère, j’avais envoyé des dizaines de candidatures et passé des entretiens qui n’ont finalement pas abouti pour des raisons administratives… j’étais à quelques jours de la limite pour trouver une alternance pour mon Mastère, mais je l’ai décrochée grâce à un like sur un post LinkedIn, n’ayant rien à voir avec mon métier ! Je suis finalement restée plus de 5 ans et demi en alternance puis en CDI chez Transparency-One 🙂 Mon poste actuel chez Monsieur Guiz, je l’ai obtenu car j’ai reçu un message du CEO sur ma messagerie LinkedIn 🙂
N’hésitez pas à bien indiquer dans votre titre LinkedIn (et surtout votre CV) le poste que vous recherchez, et mettre à jour régulièrement votre profil, avec de bons mots-clés !
As-tu un conseil à donner à nos futurs diplômés ?
De s’amuser et de bien sélectionner son alternance pour progresser dans de bonnes conditions avec un mentor qui saura vous faire monter en compétence !
